En mai, le rat noir lit ce qui lui plaît
Edmund Wilson : Pardon aux Iroquois
Edmund Wilson est né en 1895. Rédacteur en chef adjoint de The New Republic, il fut également un des plus grands critiques littéraires américain du XXème siècle. Il a influencé entre autres, Sinclair Lewis, John Dos Passos et Upton Sinclair.
Pardon aux Iroquois (éd. Lux, traduction Solange Pinton) a d’abord été publié sous forme d’articles dans The New-Yorker en 1959. L’année suivante il devient un livre qui, traduit en français en 1976, est rapidement épuisé. Dans l’introduction, Edmund Wilson explique comment et pourquoi il l’a conçu et surtout par quel biais il a eu la chance de pouvoir approcher de près les tribus iroquoises. Suit un texte de Joseph Mitchell qui nous fait découvrir « Les Mohawks charpentiers de l’acier ». En effet, ces derniers, agiles et insensibles au vertiges devinrent incontournables aux Etats-Unis et au Canada sur les chantiers des grandes constructions (ponts ou gratte-ciels). Mais une fois à la retraite, les difficultés qu’ils éprouvent à revenir vivre dans les réserves « trop américains et plus assez Indiens ». Après cet aspect des choses, Edmund Wilson reprend la plume.
Il nous raconte comment, après avoir appris par hasard en 1957 que sa maison de vacances au Nord de l’Etat de New-York se situait sur les terres iroquoises, il commença à s’intéresser à eux et à leur histoire. De 1784, date du « Traité des Six nations Indiennes » qui rendait inviolable leur territoire [note], à son invasion par les colons en dépit du traité [note].
Il rend visite à Standing Arrow, dans la Maison Longue [note]. Ce chef Mohawks qui revendiquait à la fin des années 1950, l’application des droits juridiques des Iroquois en vertu du traité. Edmund Wilson nous raconte ensuite la fabuleuse histoire des Iroquois, de la Révolution américaine (1763) et de la constitution de la Confédération des Six Nations, aux influences laissées par les évangélises Quakers, Catholiques, Protestants et Mormons !
Nous découvrons le système matrilinéaire des différentes tribus qui composent la Ligue, leurs relations familiales, l’éducation donnée aux enfants, le respect accordé aux vieillard et les règles de l’hospitalité. Mais aussi, la face sombre : les divisions claniques et les ravages de l’alcool.
L’auteur nous invite ensuite, à un Conseil des sages dans la réserve des Onondaga, originaires de Mongolie, dernière des tribus iroquoise à avoir intégré la Ligue. Il s’étend longuement sur la « prise de conscience nationale iroquoise » en réaction aux conflits de plus en plus nombreux entre les institutions des Blancs et le droit coutumier indien (construction des barrages et autoroutes aussi bien sur les territoires canadiens qu’étatsuniens). Sans oublier les aspects juridiques (impôts fonciers, jurisprudences, passage des frontières).
Edmund Wilson nous raconte après, la singulière épopée des Tuscaroras, chassés de Caroline du nord en 1715 par les Blancs, qui mirent presque un siècle avant d’atteindre le Niagara. Puis, nous l’accompagnons dans la tribu des Sénécas, considérés par les Blancs comme le peuple « le plus évolué » des six nations. Nous assistons à plusieurs de leurs cérémonies rituelles, découvrons leur humour particulier.
L’ouvrage se termine sur la révolte des Indiens indépendantistes en 1959, tandis que dans la postface, Vine Deloria nous raconte les circonstances du bide du Grand rassemblement des nations indiennes à Washington en 1972, sous le gouvernement Nixon et les perspectives peut-être plus sereines si les Indiens d’Amérique se joignent à la lutte des autres peuples aborigènes opprimés dans le monde…
Patrick Schindler, Le Monde libertaire, 2 mai 2022.
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