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Détail de la couverture du titre «Odyssée lumpen».
1 avril 2024

À lire sans modération

Un récit décapant que cette Odyssée lumpen de Alberto Prunettti, sans doute pour une large part autobiographique. L’auteur, un fils d’ouvrier, métallo et syndicaliste de la région de Livourne en Italie, au chômage après quelques études supérieures, émigre à Bristol en Grande-Bretagne où, paraît-il, le travail coule à flots. Là, commence l’aventure. Tout d’abord dans une pizzeria, car son anglais est insuffisant, où il exerce en tant que pizzaiolo. Là, il subit une exploitation maximum sous prétexte d’une entreprise familiale, pas de contrat de travail (à quoi bon, la confiance règne), horaire à rallonge, heures supplémentaires non payées, licenciement sans préavis. Mais aussi, et c’est tout l’intérêt du livre, des portraits réalistes et sympathiques de prolétaires presque en haillons de la sous-classe ouvrière britannique pauvre, mais solidaire. À la suite de l’aventure «italienne», on retrouve Prunetti dans un centre commercial comme nettoyeur de «chiottes» et videur de poubelles en proie au harcèlement et aux humiliations d’une contre-maîtresse zélée. Là encore, des rencontres d’un petit monde souterrain exécuteur des basses oeuvres. Nouveau départ, et le voilà aide-cuistot dans une école de la middle-class où il sert des enfants ingrats, mais où l’ambiance de travail, toujours parmi et avec les lumpens, est plus détendue, entre pétard, bière et football. Puis, il vit une courte expérience d’ouvrier agricole, aussi trash, avant de se décider à retourner à Piombino où le drame l’attend. Il y retrouve un père usé par le travail, déprimé et mourant dans une ville sinistrée où le chomdu règne suite à la fermeture de l’aciérie et de son haut-fourneau éteint. Partout, la working class est victime des restructurations d’un capitalisme dévorant et mortifère pour lequel, seul le profit compte au détriment de ceux et celles dont il se nourrit. Un portait saisissant d’une classe ouvrière un peu à la dérive, mais souvent chaleureuse et malgré tout fière, même si pour un temps les luttes collectives ont été oubliées.

Un texte plein d’humour et de réalisme où sont bien décrites les conditions de travail et d’exploitation des ouvriers autochtones ou émigrés intra-européens dans un United Kingdom ultralibéral et post-thatchérien. Un livre qui n’est pas sans rappeler les films de Ken Loach.

À lire sans modération.


Hugues, Le Monde libertaire, no 1860, avril 2024.

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