Une lettre coup de poing sur la crise climatique
Deux politiciens de camps opposés peuvent-ils changer d’avis quant à la question des changements climatiques ? Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de Québec solidaire, croit que oui. Il écrit l’ouvrage Lettre d’un député inquiet à un premier ministre qui devrait l’être afin de s’adresser directement à François Legault sur la question.
Le samedi 29 février, Nadeau-Dubois en a discuté avec Daniel Mathieu, animateur, dans le cadre du Salon du livre de l’Outaouais (SLO).
Dans cet entretien d’une durée de 30 minutes, l’homme politique s’est prononcé sur son ouvrage ainsi que sur les constatations qu’il pose face à l’enjeu qu’est la lutte aux changements climatiques.
Une lettre de 93 pages
La longue lettre est divisée en chapitres et se lit assez rapidement ; en résulte un compte rendu dense des préoccupations environnementales de Nadeau Dubois ainsi que de ses pistes de solution pour le premier ministre.
L’auteur désirait présenter un ouvrage court, punché et droit au but. Il explique que ce dernier cherche à convaincre ceux et celles qui, comme François Legault, ne comprennent pas le sentiment d’urgence qui habite les écologistes.
Il aspire ainsi à créer un dialogue entre les deux partis et éveiller une prise de conscience sincère chez son interlocuteur.
Par où commencer ?
Nadeau-Dubois affirme que l’enjeu des changements climatiques devrait être « l’arrière-plan sur lequel on [débat] de tout le reste ». Durant l’entretien, Nadeau-Dubois aborde plusieurs pistes de solution. Il propose de densifier les centres urbains, de protéger ce qu’il nous reste de terres agricoles et de concentrer la croissance démographique dans les endroits qui sont déjà développés.
Il souligne que l’étalement urbain contribue à augmenter les gaz à effet de serre (GES) et que malgré tout, 95 % de la croissance démographique dans des endroits comme Gatineau ou le Saguenay a lieu dans les couronnes extérieures des villes.
Daniel Mathieu soulève que les prix du logement dans les centres urbains sont souvent trop élevés pour plusieurs. « Une des manières, en effet, de lutter contre l’étalement urbain c’est de rendre abordable, convivial et pratique de vivre en ville », répond Gabriel Nadeau-Dubois.
Il rappelle aussi que l’Ontario possède une loi fixant la hausse du prix du logement. Cette dernière permet ainsi de limiter les hausses que les propriétaires pourraient être tentés de mettre en place. Une loi similaire pourrait être appliquée au Québec, selon lui. Il réitère d’ailleurs en soulignant qu’une grande partie du virage doit se faire par l’électrification des automobiles. Celui-ci précise qu’une grande partie des régions ne pourront pas se conformer au transport en commun, vu la densité de population.
Le pouvoir de la classe politique
Bien que Gabriel Nadeau-Dubois conçoive la crise climatique comme inévitable, il énonce que la classe politique possède tout de même un contrôle pour en diminuer les conséquences. « Entre l’inaction ou le business as usual, et des plans de lutte de changements climatiques ambitieux, la différence est énorme », explique-t-il.
Le virage vert repose sur la classe politique selon le politicien. « Ce qu’on vit en ce moment, c’est la conséquence directe de choix politiques qui ont été faits, ou qui n’ont pas été faits dans les 30 dernières années », exprime-t-il.
« Le premier ministre vous répondra ; oui, mais je veux être réélu » ; énonce Daniel Mathieu. À ce sujet, l’auteur avoue que le système politique tel qu’il l’est aujourd’hui pose des enjeux cruciaux.
« Le système est basé sur le fait de promettre aux gens plus de confort, plus de bonheur matériel, plus d’argent dans leurs poches […], alors que la crise écologique nous oblige à penser en termes de renonciations », rétorque le politicien. Il précise aussi que la classe politique aurait la responsabilité d’encourager la population à adopter le virage vert, notamment en leur rappelant les avantages collectifs qui en découlent.
Réponse de François Legault
Le premier ministre François Legault a pris le temps de lire le livre, avant de répondre à Gabriel Nadeau Dubois, sur Facebook, le 30 novembre 2019. Celui-ci a concédé, dans un premier temps, que l’urgence climatique existe et qu’elle coûtera cher au Québec.
Il a ajouté que Nadeau-Dubois « oublie » certains point importants dont « le grand défi d’éliminer [l’]écart de richesses avec nos voisin.e.s ». Il réitère « l’importance de s’entendre sur une bourse carbone commune avec nos voisin.e.s ».
Le débat n’est pas clos. Pour se procurer le livre Lettre d’un député inquiet à un premier ministre qui devrait l’être des éditions Lux, il est à vendre au SLO ainsi que dans les librairies de la région.
Clémence Roy-Dariss, La Rotonde, 2 mars 2020
Photo: courtoisie SLO
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