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Portrait photo de Mark Bray.
10 octobre 2025

Menacé de mort, un spécialiste de la mouvance antifasciste quitte les États-Unis

Mark Bray et sa famille sont partis pour l’Espagne. Le gouvernement Trump qualifie les «Antifas» de terroristes.

Mark Bray est spécialiste de la mouvance « Antifa » à l’Université Rutgers, dans l’est des États-Unis. Visé par une pétition, menacé de mort, il a fui les États-Unis, où le gouvernement Trump qualifie de « terroristes » les groupes se réclamant du mouvement.

« Notre avion pour l’Espagne est dans les airs ! » a-t-il posté vendredi sur son compte Bluesky. « Merci infiniment aux innombrables personnes qui nous soutiennent de toutes les manières et en particulier à tous les étudiants et professeurs de Rutgers, qui nous ont soutenus à chaque étape. »Mercredi, l’universitaire américain avait tenté une première fois de quitter le territoire américain avec sa famille, à bord d’un avion pour l’Espagne quand, après avoir enregistré ses bagages et passé la sécurité, « une chose très étrange s’est produite : quelqu’un a annulé notre réservation », a-t-il témoigné auprès de l’AFP.

« Tout cela a été très stressant. Ça l’est encore plus avec de jeunes enfants, ma vie a été bouleversée. »

Ce professeur d’histoire a même pris la peine de prévenir ses élèves, dans un courriel envoyé dimanche, que l’AFP a pu consulter.

« Cette semaine […], j’ai reçu une nouvelle menace de mort ainsi qu’un autre message avec mon adresse. L’université et la police ont été prévenues. Ma famille et moi ne nous sentons plus en sécurité chez nous et avons décidé de passer le reste de l’année en Europe », leur a-t-il écrit.

« Me tuer devant mes étudiants »

Le mouvement Antifa (diminutif d’antifasciste) est une nébuleuse d’extrême gauche sans existence légale formelle et a été récemment classé comme « organisation terroriste » par le gouvernement américain.

« Trump utilise les Antifas pour diaboliser les manifestations, qu’il assimile au terrorisme. Ils [le gouvernement] essayent d’étendre ce mot à tous ceux qu’ils n’aiment pas et me collent l’étiquette d’Antifa car j’ai écrit un livre sur le sujet », assure le scientifique.

S’il reconnaît avoir « un passé de militant — j’ai participé à “Occupy Wall Street” [mouvement de gauche anticapitaliste] en 2011 — », il assure n’avoir « jamais pris part à un groupe antifasciste ».

Âgé de 43 ans et auteur de plusieurs livres sur l’antifascisme et les mouvements de gauche, il a d’abord été la cible de publications sur X diffusées après l’assassinat le 10 septembre de l’influenceur pro-Trump Charlie Kirk.

« Après ces publications, j’ai reçu ma première menace de mort. Quelqu’un m’a écrit pour me dire qu’il allait me tuer devant mes étudiants », ajoute l’universitaire.

Le militant d’extrême droite Jack Posobiec l’a traité de « professeur terroriste », tandis qu’Andy Ngo, créateur de contenus conservateurs, l’a accusé d’être un « militant antifasciste ».

Tous deux ont été invités à la Maison-Blanche mercredi par Donald Trump lors d’un événement dédié à la « menace Antifa ». Une menace plus dangereuse que le groupe armé État islamique et le mouvement islamiste palestinien Hamas, selon Kristi Noem, secrétaire à la Sécurité intérieure.

Liste de « professeurs à surveiller »

Une pétition réclamant son renvoi avait aussi été lancée par l’antenne de Turning Point USA, l’organisation fondée par Charlie Kirk, à l’Université Rutgers, dans le New Jersey.

« Nous, les étudiants de l’Université Rutgers, sommes profondément inquiets d’apprendre qu’un membre ouvertement connu d’Antifa, le Dr Mark Bray, est employé par l’université […]. Avec la tendance actuelle du terrorisme de gauche, avoir un leader du mouvement Antifa sur le campus est une menace pour les étudiants conservateurs », peut-on lire dans ce texte ayant récolté près de 1200 signatures vendredi matin.

Mark Bray apparaît également sur une « liste des professeurs à surveiller » tenue par Turning Point USA.

Depuis le début de son second mandat en janvier, Donald Trump est parti à l’offensive contre les universités, avec une série de décisions qui ont secoué la communauté scientifique : sujets d’étude mis au ban, subventions gelées, chercheurs persona non grata pour des considérations politiques supposées.

En mars, des professeurs avaient annoncé partir enseigner au Canada. Des étudiants quittent également les États-Unis pour poursuivre leurs études ailleurs.


Victoria Lavelle, Le Devoir, 10 octobre 2025.

Photo: Ted Shaffrey Associated Press. Auteur de plusieurs livres sur l’antifascisme et les mouvements de gauche, Mark Bray, qu’on voit ici jeudi dans une chambre d’hôtel après l’annulation de son premier vol pour l’Espagne, assure même n’avoir «jamais pris part à un groupe antifasciste».

Lisez l’original ici.

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