Edward Bernays : guide du prosélytisme en démocratie
Neveu de Sigmund Freud, diplômé d’agronomie et journaliste occasionnel, Edward Bernays fut un personnage haut en couleurs, qui prodigua ses conseils à de nombreuses entreprises et orchestra maintes campagnes d’opinion, aux États-Unis comme en Amérique latine. Avec Propaganda, il signa un volume mince et incisif, qu’un regard trop pressé qualifierait de cynique.
Bernays part d’un constat simple : l’avènement de la société démocratique oblige les classes dominantes à inventer des formes originales de persuasion, afin d’influencer l’opinion des « masses ». Industriels du velours ou militantes féministes, politiciens va-t-en-guerre ou clubs de bridge : partout, des « hommes de l’ombre » et des « minorités intelligentes » essaient d’emporter l’adhésion du plus grand nombre.
Exemples à l’appui, Bernays mobilise donc les acquis des sciences humaines, notamment de la psychologie et de la psychanalyse, pour dessiner les contours d’un « prosélytisme actif ». Une « nouvelle propagande » dont les modalités sont inséparables de notre modernité politique : « cette structure invisible qui lie inextricablement groupes et associations est le mécanisme qu’a trouvé la démocratie pour organiser son esprit de groupe et simplifier sa pensée collective. Déplorer l’existence de ce mécanisme, c’est vouloir une société telle qu’il n’y en a jamais eu et qu’il n’y en aura jamais », prévient-il.
Jean Birnbaum, Le Monde, 25 octobre 2007
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