Le libraire, 28 septembre 2009
Livre référence:
Une histoire du jazz à Montréal
Les nuits de Montréal
Il y a dix ans, j’ai eu l’outrecuidance de faire paraître Toute la ville en jazz, un essai dont une bonne partie était consacrée à un survol historique impressionniste et bien incomplet de la riche histoire du jazz à Montréal et au Québec. Avec la parution cet été d’Une histoire du jazz à Montréal, version française de Swinging in Paradise. A Story of Jazz in Montreal de l’historien John Gilmore, initialement publié en 1987, force m’est de reconnaître qu’une réédition de mon propre bouquin aujourd’hui indisponible serait absolument superflue.
Du lendemain de la Première Guerre mondiale jusqu’à l’arrivée dans les années 60 d’un maire soucieux des bonnes mœurs nommé Jean Drapeau, Montréal attirait comme du miel les mouches des jazzmen issus de tous horizons — et dont cependant beaucoup étaient des Noirs américains qui fuyaient cette sorte d’apartheid innommé en vigueur dans leur patrie ! La métropole québécoise leur offrait des boîtes ouvertes jusqu’à l’aube, de l’alcool à profusion et des contrats stables en abondance ; c’est ce qui en avait fait, bien avant la fondation du Festival international de jazz dans les années 80, un véritable centre névralgique du jazz en Amérique.
En s’appuyant sur des entrevues réalisées avec des musiciens et d’autres survivants de cette période faste pour la note bleue au Québec, Gilmore nous fait revivre ces années-là, nous promène de l’un à l’autre de ces clubs mythiques (Le Montmartre, Le Rockhead’s Paradise, L’Esquire, le Café Saint-Michel), et fait défiler devant nos yeux les spectres de ces musiciens qui ont émergé durant cette période, dont un certain pianiste virtuose originaire du faubourg Saint-Henri et dénommé Oscar Peterson. Préfacé par Gilles Archambault, qui en connaît un bout sur Montréal et le jazz, finement traduit par la poète Karen Ricard, ce livre est indispensable pour quiconque s’intéresse à l’histoire culturelle de la métropole… et au jazz, il va sans dire !
Stanley Péan,
Le libraire, 28 septembre 2009