ACTUALITÉS

24 janvier 2016

Le Devoir, Samedi 13 et dimanche 14 mars 20

Livre référence:
Le XXe siècle américain

Le siècle des Américains, selon Howard Zinn
[…]

De solides constantes
Une des fascinations qu’exerce le livre de Zinn est cette présence de quelques solides constantes qui, relevant de l’idéologie et de la doctrine,traversent, sous l’apparente diversité de motivations officielles, le vingtième siècle américain. En 1890, les militaires ont massacré les derniers Indiens libres à Wounded Knee de l’Amérique, qui a dépouillé le Mexique du tiers de son territoire, est maîtresse des rives du Pacifique. Quatre cents ans après Colomb, les financiers yankees, estimant que la production nationale dépasse désormais les possibilités de leur marché intérieur, se mettent à leur tour à rêver (déjà !) de la Chine. Le thème de la « porte ouverte » au commerce va dorénavant dominer et déterminer toute la politique étrangère des États-Unis jusqu’à prendre la forme que nous lui connaissons aujourd’hui.

Les guerres impérialistes, elles, vont se succéder et suivre, grosso modo, un scénario identique, peu importe le président au pouvoir, peu importe le parti auquel il appartient. Ce scénario, dans ses grandes lignes, ressemble à ceci : identification d’un marché potentiel ; création d’un incident diplomatique ou militaire capable de justifier l’agression ; fabrication d’un consensus national grâce à une campagne de propagande parfois hystérique où les médias de masse, se comportant le plus souvent en porte-parole dociles des intérêts de la classe qu’ils représentent, reprennent le Mensonge Officiel et s’en servent pour canaliser et exciter l’inévitable flot de démagogie patriotique que suscite cette nouvelle « menace » à la sécurité de la nation. Ce n’est pas d’hier que date, en effet, la tradition voulant que toute critique de la politique officielle soit appelée à se taire et à serrer les rangs une fois que les boys se retrouvent sur le terrain. Et si, grâce à des gens comme Howard Zinn, cet aspect de l’histoire de nos puissants voisins était mieux connu, on serait peut-être moins tenté aujourd’hui de feindre l’étonnement devant les mensonges de l’administration Bush, qui n’a fait que se conformer, dans l’affaire irakienne, à un principe éprouvé, devenu une sorte de dogme occulte dont toute l’histoire du siècle précédent confirme le relatif bon fonctionnement.

[…]

Le trait le plus frappant que met en lumière l’ouvrage en tous points remarquable de M. Zinn est cette obscène parenté qui, entretenue par une parfaite bonne conscience, unit un supposé intérêt commun de la nation à celui du lobby militaro-industriel qui, il y a déjà plus de cent ans, l’a confisqué à son propre profit.

Louis Hamelin
Le Devoir, Samedi 13 et dimanche 14 mars 20

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