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Un electrocardiogramme indiquant la mort.
29 juin 2019

La mort, expliquée par l’urgentologue Alain Vadeboncoeur

« La mort est essentiellement un arrêt de la circulation. Le cœur arrête de fonctionner, ne fait plus son travail. […] Les cellules arrêtent de fonctionner parce que l’oxygène est le carburant suprême », explique Alain Vadeboncoeur. L’urgentologue et chef du Service de médecine d’urgence de l’Institut de cardiologie de Montréal décrit les diverses étapes de la mort.

Même s’il est responsable du bon fonctionnement du corps humain, le cœur est capable de revenir à la vie après trois ou quatre heures; il est donc possible de le congeler en vue d’une transplantation. Par contre, le cerveau est l’organe qui se détériore le plus rapidement lorsque le corps manque d’oxygène.

Rigidité et couleur

Deux ou trois heures après la mort, les muscles se rigidifient. Ce phénomène de contraction s’explique par la présence de calcium dans le corps, qui dès lors s’y déplace. Après 48 ou 72 heures, le corps retrouve sa souplesse. Quant à sa couleur, elle change rapidement, car les globules rouges ne sont plus oxygénés. Une fois que le corps est privé d’oxygène, il prend une teinte bleutée. Lorsque la circulation sanguine s’arrête, le teint devient grisâtre. Le corps refroidit rapidement et atteint la température environnante.

À la mort, le système immunitaire du corps tombe, et 18 heures plus tard, les bactéries s’en donnent à cœur joie. « C’est comme si un nouvel écosystème arrivait. On est en équilibre, et ce nouvel équilibre implique que les bactéries vont faire leur travail, c’est-à-dire qu’elles vont avoir le goût d’aller se promener, de voyager », explique Alain Vadeboncoeur. Après une cinquantaine d’heures, celles-ci traversent toutes les barrières et colonisent le corps.

« Pour elles, c’est vraiment quelque chose d’agréable, mais nous, on appelle ça la putréfaction. C’est une vie en soi, c’est un nouvel écosystème qui s’installe graduellement. »

— Une citation de  Alain Vadeboncoeur, urgentologue

La décomposition du corps prend quelques semaines. Il ne reste que les os après ce temps. « Nos rites funéraires changent un peu ça. […] Des substances vont être injectées pour retarder ce processus [la décomposition], et c’est même très long dans les conditions de l’embaumement. »

Dans un laboratoire, des instruments de thanatopraxie (ciseaux-couteaux-baume) déposés sur un plateau
Des instruments de thanatopraxie. Radio-Canada / Mireille Roberge

Après la mort, les tissus perdent un peu de leurs liquides, et on a donc l’impression que les ongles et les cheveux s’allongent un peu. Ainsi, c’est le corps qui rétrécit. Le mythe des cheveux et des ongles qui poussent après la mort se comprend ainsi.

Selon Alain Vadeboncoeur, la mort est un contre-exemple de l’univers en expansion.

« Normalement, les choses se dégradent avec le temps, et la vie va dans le sens inverse. Un embryon se développe et devient extrêmement complexe, et va être capable de maintenir un état d’équilibre presque parfait sur des milliers de phénomènes biologiques pendant 60, 70, 80, 85 ans […], alors que dès qu’on interrompt la source d’énergie, l’oxygène, les lois de la physique reprennent le dessus. Ça se dégrade, l’information se perd. Le désordre, ce qu’on appelle l’entropie, reprend son droit. C’est comme si l’on remontait le fleuve de l’univers pendant un certain temps avant d’être emporté de nouveau par la suite. »

— Une citation de  Alain Vadeboncoeur, urgentologue
Le Dr Alain Vadeboncoeur sourit à la caméra.
Le Dr Alain Vadeboncoeur. Radio-Canada / Hamza Abouelouafaa

Enfin, l’urgentologue ne croit pas que nous percevions notre propre mort. Ce qui est clair, selon lui, c’est que nous perdons conscience avant de mourir. « Autrement dit, la mort n’est pas une expérience. C’est une hypothèse. »


La nature selon Boucar, ICI Première, 29 juin 2019.

Photo: iStock

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