Lors d’une grève massive en mai 1886, à Chicago, une bombe explose, tuant sept policiers. Huit hommes qui défendent les droits des travailleurs sont arrêtés et quatre d’entre eux sont pendus. L’historien Martin Cennevitz retrace, dans son livre, l’intimité de leurs destins.
Alors que la Fête des travailleurs est célébrée presque partout dans le monde le 1er mai, les Etats-Unis suivent un autre calendrier avec le premier lundi du mois de septembre, désigné comme le Labor Day. Cette décision ne doit rien à une excentricité locale.
Lorsque, en 1889, la Seconde Internationale fait du 1er mai la Fête des travailleurs, elle voulait notamment commémorer des événements survenus à Chicago (Illinois), en 1886. Or le président américain Grover Cleveland (1837-1908) ne voulait pas entendre parler de cette date, redoutant qu’on alimente ainsi le souvenir de grèves et d’injustices qui avaient marqué le mouvement ouvrier dans son pays. C’est précisément pour entretenir cette mémoire que l’historien et enseignant Martin Cennevitz publie Haymarket. Récit des origines du 1er-Mai, dans lequel il fait revivre un événement d’envergure internationale, le massacre d’Haymarket Square.
Le 1er mai 1886, une grève massive éclate à Chicago, grand centre industriel des Etats-Unis, pour défendre la journée de travail de huit heures. Trois jours plus tard, un rassemblement est organisé à Haymarket Square, mais les choses dégénèrent. Une bombe explose, sept policiers sont tués, et les forces de l’ordre tirent dans la foule. Entre quatre et huit personnes sont tuées, des dizaines d’autres, blessées.
Au lendemain de ces troubles, un esprit de vengeance s’empare des autorités. Huit hommes, August Spies, Albert Parsons, George Engel, Michael Schwab, Adolph Fischer, Louis Lingg, Oscar Neebe et Samuel Fielden, sont arrêtés et accusés, à tort, d’être à l’origine de l’attaque. C’est l’intimité de leurs destins que reconstitue ici Martin Cennevitz.
Hésitations et courage
Ils ont en commun de lutter pour les droits des travailleurs, ce qui en fait de parfaits boucs émissaires pour la police, qui n’arrive pas à identifier l’auteur de l’attentat. La justice acquiesce et choisit de broyer leurs vies. Quatre d’entre eux sont pendus, un se suicide en prison. Deux autres obtiendront que leur peine soit commuée en un emprisonnement à vie. Le dernier devait rester quinze ans derrière les barreaux, il est gracié en 1893.
Ces événements sont connus et ont fait l’objet de nombreux travaux historiques. Martin Cennevitz les fait cependant revivre en se rapprochant au plus près de ces huit hommes, en s’invitant dans leurs cellules. Il reconstruit avec attention les pensées qui ont pu s’emparer d’eux au moment où leurs vies leur échappaient. Il montre leurs doutes, leurs hésitations, le courage dont ils firent preuve.
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Marc-Olivier Bherer, Le Monde, 12 septembre 2023.