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Détail de la couverture du livre «Quelqu'un doit parler».
11 mai 2024

Essai: dialogue sur la mort et autres problèmes insolubles

« La mort, c’est ce qui nous arrive », écrit en préface Nicholas Cotton. Elle nous guette à chaque instant de notre vie. On sait qu’elle va finir par arriver jusqu’à nous, mais entretemps, c’est celle des autres qui nous touche au plus profond de nous-mêmes, nous poussant à l’introspection sur notre propre destin.

 

Cet ouvrage nous convie à un dialogue-méditation entre deux écrivains, l’un professeur et essayiste, et l’autre parlant à partir de sa pratique d’urgentologue, abordant sans contrainte la mort sous tous ses aspects, maladie, pandémie, souffrance, aide médicale à mourir, religion et rituels, place de l’écriture, etc.

Si pour Bélisle, qui a écrit un livre fascinant sur le sujet, Ce qui meurt en nous, la mort est une véritable tragédie, parce qu’incontrôlable, en nous et autour de nous, pour Vadeboncœur, elle est une fatalité et objet de fascination.

Dans son essai publié en 2014, Les acteurs ne savent pas mourir, l’urgentologue affirmait que les acteurs, soit au théâtre, dans une série télévisée ou au cinéma, étaient plutôt « assez moyens quand ils essayaient de jouer la mort ».

D’ailleurs, il s’oppose à la version idyllique de la mort qu’on trouve dans la littérature, alors que dans la vie, la mort est un vague borborygme, où le cerveau lutte pour sa survie, n’ayant plus assez d’énergie pour produire de la beauté.

La mort n’existe pas

Deux visions s’opposent ici. Pour Vadeboncœur, la mort n’existe pas vraiment, dans le sens où la lignée se perpétue à travers les enfants depuis environ quatre milliards d’années. Il parle de « transmission ».

En fait, avoue-t-il à Bélisle, « nos enfants continuent nos vies, la tienne, la mienne, la vie en fait. Ils poursuivent ce projet considérable de la vie elle-même, transformant nos visions individualistes ».

Et il cite, en exemple, ses arrière-grands-parents, qui côtoyaient la mort plus fréquemment qu’aujourd’hui, parce que bien souvent les enfants mouraient en bas âge, faute de médecine adéquate. Aujourd’hui, cette relation a changé, les gens vivent plus longtemps et les grandes épidémies faucheuses de vies sont moins fréquentes.

L’irremplaçable

Pour Bélisle, la présence de la mort chez les moins de 35 ans se traduit par les multiples inquiétudes dues aux changements climatiques, dans une vision presque apocalyptique de l’effondrement de l’univers, avec feux de forêt à répétition et raz-de-marée continentaux. Ce qui sera détruit sera irremplaçable, comme le démontre la disparition de certaines espèces, d’où la tragédie qu’engendre la mort. La menace est bien présente et il faut que les gouvernements interviennent, plaide-t-il.

Mais Vadeboncœur, encore une fois, a une autre vision. Il n’y a pas lieu de crier au loup. Pour le non-croyant qu’il est, la mort est la fin d’un individu, alors que pour les croyants religieux, ce serait le passage vers quelque chose au-delà, « une sorte de tunnel un peu bizarre qu’on emprunte en transition vers un au-delà rédempteur ou même un retour, comme les vrais croyants en semblent convaincus ». La mort, comme un passage vers « un monde meilleur », très peu pour lui. Une telle vision édulcore la mort, nous empêche de voir la réalité en face : « la fin de l’existence individuelle, objectivement et subjectivement ».

Bref, ces échanges autour du thème de la mort pourront contribuer à nous la rendre non pas sympathique, mais un peu moins dramatique.


Jacques Lanctôt, Le Journal de Montréal, 11 mai 2024.

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