Contrecarrer les récits officiels
3,4 milliards de tonnes, c’est la quantité de déchets solides qui seront produits annuellement à l’horizon 2050, contre 2 milliards aujourd’hui, selon la Banque mondiale. Quant aux victimes de la présence des décharges sauvages, de sites pollués, elles se comptent déjà en millions. Ces chiffres et d’autres justifient à eux seuls d’ajouter un autre néologisme à la famille des mots en «cène» (anthropocène…). Par poubellocène, l’auteur entend bien plus que la simple accumulation de substances et matières qui pollueraient les sols, l’eau, l’air et jusqu’à nos corps: «des rapports socio-écologiques qui produisent des lieux et des êtres jetables» (par contraste avec des lieux aseptisés, réservés à une minorité). Les solutions ne sauraient donc être seulement techniques. Pour étayer son propos, Marco Armiero nous conduit dans la ville de Naples d’hier et d’aujourd’hui, mais aussi au Ghana, dans un vieux cimetière de village… Historien italien, il porte son attention sur l’imaginaire de la littérature de science-fiction, ainsi que sur les formes de «guérilla narrative» susceptibles de contrecarrer les récits officiels qui tendent à imputer aux victimes la responsabilité de leur sort.
Sylvain Allemand, Alternatives économiques, no 454, janvier 2025.