Comme plusieurs militants de la nébuleuse altermondialiste, sans doute, j’ai connu Noam Chomsky à travers le documentaire Manufacturing Consent. Noam Chomsky and the Media. C’est par ce film que j’ai été marqué par la pensée, l’énergie et l’humanité de cette figure de proue de la gauche états-unienne. Par la suite, lorsqu’est venu le temps de me familiariser avec ses écrits, c’est sur L’an 501. La conquête continue (Écosociété, 1995) que mon choix s’est arrêté. L’aspirant bachelier que j’étais alors eut grand peine à digérer cet ouvrage au style quelque peu alambiqué.
Or, c’est avec plaisir que j’ai retrouvé Chomsky dans Comprendre le pouvoir. Ici, son analyse, rassemblée à partir de dialogues tenus avec des militantes entre 1989 et 1999, est d’une clarté des plus rafraîchissantes. Il est d’autant plus intéressant qu’une bonne moitié de l’ouvrage (la seconde) s’attarde sur des sujets à propos desquels Chomsky fait habituellement preuve de plus de retenue, tels que l’efficacité de l’activisme et son rapport à la violence, l’épistémologie des sciences et des sciences humaines, Marx et le marxisme, l’école et l’université, et j’en passe. Par ailleurs, les discussions qui composent la première moitié du livre, où il est surtout question de la politique étrangère des États-Unis, ont près de 20 ans, ce qui nous introduit à la «matrice chomskienne» d’un point de vue surtout historique. Une charmante brique, luxuriante, mais jamais intimidante. Comme on les aime, quoi.