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12 mars 2019

À Porto Rico, deux visions antagoniques du monde

Dans son dernier livre, Naomi Klein décrypte la «stratégie du choc» actuellement à l’œuvre dans l’île. Et met à l’honneur celles et ceux qui y résistent.

Frappé de plein fouet par l’ouragan Maria, en septembre 2017, Porto Rico a connu des mois de pénurie. Non seulement l’aide a été tardive et souvent inadaptée, mais les habitants ont vu de surcroît débarquer sur leur île des «investisseurs» bien décidés à tirer profit du désastre. Cette «stratégie du choc», emblématique du néolibéralisme, Naomi Klein l’avait décrite en détail dans son livre éponyme, paru dix ans auparavant. Elle y revient ici sous la forme d’un reportage au long cours, réalisé en janvier 2018 à l’invitation d’un collectif de professeurs portoricains. La journaliste et essayiste canadienne montre que les conséquences de la catastrophe météorologique ont été amplifiées du fait du sort réservé à l’île: prise dans une relation coloniale avec les États-Unis depuis cent trente ans, celle-ci a déjà enduré des vagues d’austérité (notamment après la crise financière mondiale de 2008) qui ont mis à genoux ses services publics. La vulnérabilité de Porto Rico est due également à sa forte dépendance à l’égard des importations de combustibles fossiles et de denrées alimentaires, alors que d’autres voies sont possibles. Et c’est là, justement, l’axe majeur de cet ouvrage.

La rencontre d’acteurs locaux engagés dans des expériences de « fermes biologiques » ou de « centres communautaires » à visée écologique permet la mise en lumière des capacités de Porto Rico à se réapproprier sa souveraineté, dans le sens de l’intérêt général. «Si Maria est une professeure (…), sa principale leçon est qu’il n’est plus temps de reconstruire les choses telles qu’elles étaient, mais plutôt de les transformer en ce qu’elles pourraient être», résume Naomi Klein. Une utopie positive, à l’intersection de l’écologie et du social, qui se heurte aujourd’hui à de riches libertariens ambitionnant de faire de Porto Rico «l’épicentre» du marché des cryptomonnaies type bitcoin. La lutte ne fait que commencer.

Laurent Etre, L’Humanité, 12 mars 2019

Photo: 2018, un agronome dans une ferme biologique. © Lester Jimenez/AFP

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