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10 septembre 2019

La toponymie autochtone du territoire

L’anthropologue, écrivain, animateur et conférencier Serge Bouchard présentera une visioconférence sur la protection et la mise en valeur des toponymes autochtones le mardi 10 septembre à l’hôtel de Montagnais de Chicoutimi. Voilà déjà deux toponymes d’origine amérindienne dans la première phrase de cette chronique et force est de constater que notre région en compte plusieurs qui ont traversé le temps.

« Les Anglais avaient l’habitude de donner des noms royalistes aux sites et lieux alors que les Français catholiques avaient la maladie mentale de donner des noms de saints et de martyrs pour nommer les lieux. Le lac Pekuakami a été rebaptisé lac Saint-Jean par le père Jean Dequen, la première robe noire à mettre les pieds dans votre région. Des endroits qui portent le nom de Saint-Jean, on n’est plus capable d’en voir. Jacques-Cartier a rebaptisé la rivière Hochelaga ‘‘Saint-Laurent’’ parce que la journée qu’il s’est rendu compte qu’il s’agissait d’un fleuve c’était la fête de Saint-Laurent, on commence à avoir fait le tour du martyrologe », lance d’entrée de jeu le grand admirateur des premières nations.

Des noms sont demeurés

« Malgré l’habitude des Anglais de donner des noms liés à la royauté britannique, quelques beaux toponymes ont persisté, comme Toronto par exemple qui est un nom d’origine algonquine ou Ottawa qui est aussi un terme algonquin », relève l’anthropologue.

« Votre région a conservé plusieurs toponymes amérindiens comme Chicoutimi, Saguenay, Kénogami, Mistassini. Ça donne une couleur extraordinaire au territoire, à une région. Imaginez un visiteur qui arrive dans votre coin de pays et qui trouve des noms comme Métabetchouan, Ashuapmushuan, Chigoubiche ou Mashteuiatsh, ça témoigne d’un passé autochtone », fait valoir l’auteur du récent livre Le peuple rieur, hommage à mes amis innus qu’il a écrit avec sa conjointe Marie-Christine Bouchard.

L’appellation Pekuakami, le nom innu du lac Saint-Jean, fait un retour dans le langage populaire.
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« On a fait beaucoup de chemin au cours de 40 dernières années et plusieurs noms autochtones reprennent leur droit. Pointe-Bleue se nomme maintenant Mashteuiatsh et à la Baie-James on utilise de plus en plus le nom Eeyou Istchee », fait remarquer celui qui constate une plus grande ouverture de la part de la population qui est de plus en plus informée sur la présence autochtone sur le territoire.

« Il y a 50 ans si vous aviez écrit Pekuakami en parlant du lac Saint-Jean, les gens n’auraient pas compris de quoi il s’agit alors qu’aujourd’hui l’expression est utilisée et connue de la plupart des gens, les mentalités continuent d’évoluer », dit-il.

Valeur historique

« Nous ne sommes plus à l’époque où les catholiques, ou des grandes compagnies donnent des noms aux villes comme l’a fait la Baie d’Hudson à l’époque. Fort Rupert qui est redevenu Waskaganish en est un bel exemple. De jeunes Innus s’intéressent à l’origine de leur nom de famille qui a été effacé par le métissage comme pour les Kurtness ou les Robertson », met en relief l’auteur qui souligne les dommages culturels des autochtones avec la venue d’étranger sur ces territoires.

La toponymie des lieux a une grande valeur historique pour Serge Bouchard qui a parcouru le Québec de fond en comble, « Quand j’étais petit, je ne voulais pas être un pompier, je voulais être un Indien », écrit ce passionné des cultures amérindiennes au début de son livre Le peuple rieur.

C’est à travers ce discours de la protection et la mise en valeur des toponymes autochtones que le conférencier a accepté l’invitation du comité Mouvement Chicoutimi pour relancer le débat sur le nom de la ville de Saguenay.

« Le nom Chicoutimi est un nom connu internationalement, la plupart des gens que je connais continuent de dire qu’il sont de Chicoutimi, c’est un toponyme qui a traversé le temps. Je crois sincèrement qu’on peut, de bonne foi, reconsidérer le nom de Chicoutimi pour la nouvelle ville fusionnée. On peut en tout temps corriger une erreur historique. Le nom Saguenay reste bien ancré sur votre territoire en définissant une région, un fjord, une rivière », a résumé l’anthropologue qui prendra la parole par visioconférence à compter de 19 h à la salle la Montagnaise de l’hôtel le Montagnais de Chicoutimi.

Roger Blackburn, Le Quotidien, 10 septembre 2019

Photo: Archives François Roy / La Presse

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