La révolution n’est pas une recette de Ricardo
L’art du pamphlet, du vrai pamphlet, exige de la violence et de la vulgarité. On en trouve en masse dans ce recueil de textes vu comme une « catapulte à marde » par Fred Dubé lui-même, et préfacé par François Avard. L’humoriste militant, qui a été remercié de quelques émissions pour avoir voulu brasser un peu trop la cage, varlope à qui mieux mieux, à gauche comme à droite, la médiocrité des médias, le vedettariat, le faux progressisme et le supposé « capitalisme à visage humain », bref, tout ce qui le fait suer, dans un style que ne dédaignerait certainement pas Pierre Falardeau, auquel il lève son chapeau en concluant que « la révolution n’est pas une recette de Ricardo » comme le cinéaste martelait que « la liberté n’est pas une marque de yogourt ». Des exemples ? La classe moyenne n’est faite que « d’ostis d’pauvres solvables », le gala Artis est « un concentré de disgrâce », et « ça devrait être un devoir scolaire d’envoyer chier une vedette par jour sur Facebook », qui ne mérite de toute façon comme trophée qu’un « pot Masson plein d’pisse », tandis que la seule forme de censure que subissent les humoristes est « notre manque de culture » (il s’inclut). On trouve même quelques invitations à la radicalité, quand il estime que voler des montres très chères chez François Lambert est une belle forme de Guignolée des médias ou que la seule chose qu’on devrait déposer dans une banque, « c’est une brique dans leur vitre ». Au fond, dans ce petit manuel de décroissance personnelle visant à revenir au bien commun, la vraie cible de Fred Dubé est le « sale centriste » immobilisé qui se cache en chacun de nous. Si vous aimez ça rough, ce livre est pour vous.
Chantal Guy, La Presse, 18 novembre 2018
Lisez l’original ici.