La Côte-Nord en deuil d’un amoureux de la 138 et de son peuple
Il avait la voix grave et la laine au visage. Serge Bouchard a raconté le monde des anciens, la voix des moteurs diesel et les vies de ceux qu’on avait oubliés. Si l’anthropologue chaleureux était connu de près par certains dans la région, d’autres l’ont rencontré au tournant d’une page ou en tournant le bouton de la radio. Dans tous les cas, le souvenir d’un conteur généreux reste enregistré dans le cœur des Nord-Côtiers.
La poète Maya Cousineau Mollen se souvient que ses parents racontaient que le jeune anthropologue était débarqué chez eux alors qu’il commençait les recherches de son mémoire de maîtrise au début des années 1970 sur les connaissances sur les animaux des Innus d’Ekuanitshit. J’ai toujours trouvé que c’est quelqu’un qui savait raccommoder les gens
, lance-t-elle en évoquant les bons mots et la présence apaisante de l’homme aux 1000 histoires.
Maya Cousineau Mollen a d’ailleurs écrit un poème en guise d’hommage à Serge Bouchard mardi.
Assise Un jour lugubre Des nouvelles grises Le départ d’une voix de mémoire Qui s’est battu pour notre existence…
Publiée par Maya Cousineau Mollen sur Mardi 11 mai 2021
Elle se rappelle aussi de l’avoir recroisé plus vieille lors d’une conférence à laquelle elle assistait avec plusieurs autres jeunes autochtones.
Il nous aura donné la chance de connaître une histoire qu’on a tellement voulu effacer. Lui, il nous aidait à la ramener, chapitre par chapitre.
Gloria Vollant a quant à elle rencontré le conteur prolifique principalement par ses écrits. Directrice du musée Shaputuan à Uashat, Mme Vollant se souvient de la passion de Serge Bouchard pour l’histoire des Premières Nations.
Il agissait comme un ambassadeur du côté médiatique. Il était très bon pour communiquer aux gens qui sont ces Indiens, qui sont ces Sauvages. Et ces mots-là, on ne se sentait pas frustrés qu’ils les utilisent, car c’était dans le contexte de l’histoire à une certaine époque. Avec toute la connaissance qu’il avait de notre histoire et de notre peuple, c’était un bon personnage pour nous faire connaître
, évoque Mme Vollant.
Quand on me disait : « je connais Serge Bouchard », mon réflexe c’était de me dire, ça veut dire que tu nous connais [les Innus].